> Peux-tu re présenter en quelques mots stp?
> Hey ! Je m’appelle Suzanne je suis 37 ans et j’ai célibataire ( certains comprendront la référence aux Worlds Apart). Mais sinon je m’appelle vraiment Suzanne, je viens de fêter mes 37 ans printemps un « confineversaire », je vis en région parisienne et je vis aussi avec la maladie de Crohn depuis 18 ans maintenant.
> Peux-tu nous parler brièvement de ta maladie ?
> J’ai une MICI qui regroupe plusieurs maladie dont la maladie de Crohn. Qu’est ce que c’est : c’est une maladie inflammatoire du tube digestif (de la bouche à l’anus ouais c est un peu …) donc c’est une maladie qui est liée à la digestion.
Dans mon malheur j’ai un peu de chance car j’ai une forme moins sévère de la maladie. Mes symptômes : j’ai des douleurs au ventre, des spasmes. Un peu plus imagé j’ai une partie de mon intestin qui se tord dans tous les sens et c’est vraiment pas gégé comme douleur parce que ça m’empêche de dormir (la douleur), ça m’empêche de travailler (je ne peux pas tenir debout assise ou couchée) et de m’alimenter (perte d’appétit en même temps c’est normal puisque quand on mange le système digestif travaille et me provoque des douleurs) et c’est épuisant aussi .Tout cela est lié.
> A quel moment et dans quelles circonstances as-tu su que tu étais malade ?
> A l’été 2002, j’avais vraiment très mal au ventre, je pensais que c était dû au fait que je buvais bcp d’eau vraiment glacée et que cela me retournait le ventre ms ça continuait jusqu’au jour où ma mère m’a emmené aux urgences parce que je ne tenais plus trop debout. De là après plusieurs examens et une opération car les médecins pensaient que mon appendice était malade on a découvert la maladie (oui mes douleurs étaient vraiment très localisées là où se situe l’appendice d’où cette erreur de diagnostic) ms il avait découvert la maladie, j’avais une grosse masse inflammatoire sur l’intestin.
> Comment as-tu réagit à l’annonce ?
> Je ne me souviens plus trop j’avais 19 ans à l’époque ms je pense un peu abasourdie parce qu’on vient de t’annoncer une maladie dont tu ne guéris pas Et qu’il va falloir que tu réapprennes à vivre avec …
> Quelles sont les conséquences de la maladie de Crohn au quotidien ? Est-ce qu’elle t’empêche de faire certaines choses ? Si oui, lesquelles ?
> Au quotidien, je fais un peu attention aux aliments que j’ingère ms je suis une rebelle lol j’aime trop la bouffe et me restreindre me frustre énormément. Ça c’est uniquement lorsque la maladie n’est pas active.
Lorsqu’elle l’est, je suis une alimentation sans résidus (tellement triste) et lors de poussée (crise) cela m’épuise énormément. Je n’arrive pas à dormir à cause de la douleur, ni à travailler d’ailleurs et je ne m’alimente pas trop car j’ai une perte d’appétit et forcément lors de mes crises je m’isole bcp donc je ne vois ni amis ni famille et en même temps, j’ai pas trop envie, je dois gérer la douleur. Oui cette maladie m’a bcp isolée des autres.
> Sans jouer les apprentis docteurs, quels sont les traitements ou opérations que tu as subit ?
> Il faut savoir que le traitement est propre à chacun. Moi, au début j’étais sous P****** , puis i***** car mon corps s’habituait à la molécule puis un jour j’ai arrêté tout traitement (aaaah la jeunesse) parce que je n’en pouvais plus de toujours faire attention à ce que je mange, ne pas oublier de prendre le traitement, aller à l’hôpital, faire mon suivi, coloscopie, endoscopie, fibroscopie, irm, écho, scan, prise de sang, tout ça tout ça, je n’en pouvais plus…
J’ai vécu « normalement » pendant quelques mois, puis la maladie a fait un come back fulgurant tel un boomerang qui m’a attaqué derrière la nuque lol
J’ai eu affreusement mal au ventre, j’ai tenu quelques semaines comme ça à essayer de gérer la douleur ms cela devenait vraiment insupportable. Je suis allée voir ma gastro-entérologue qui en voyant mon état (j’étais assise recroquevillée sur moi même sur un banc devant son bureau ) m’a de suite hospitalisée.
On a fait plusieurs examens de routine (irm, colo, etc etc) sauf que là, la maladie a vraiment évolué. Il y avait quasiment une occlusion intestinale et il fallait m’opérer pour enlever cette partie « malade » ms si on le faisait de suite je risquais d’avoir une poche de stomie alors on a opté pour le faire quelques mois plus tard mais pour cela, il fallait que mes intestins se reposent (que plus aucun aliment ne soit ingéré) alors j’ai eu une voie parentérale. C’est un tube que j’ai au niveau de la poitrine qui permet de m’administrer tous les nutriments afin que je n’ai pas de carence.
On m’opère quelques mois plus tard, on me fait une laparotomie et on m’enlève 20cm d’intestin donc convalescence de plusieurs mois.
À coté de ça, j’ai quand même un traitement de fond. Je continue l’i***** jusqu’à ce que mon corps s’habitue encore, alors on passe par des anti TNF. Je m’injecte alors ce produit toutes les semaines en intra-musculaire avec un autre produit du metho****** mais il ya des effets secondaires chez moi dû à ce produit, je perdais mes cheveux (je faisais de l’alopécie j’avais des zones sur mon crane où il n’y avait plus aucun cheveux j’arrivais tant bien que mal à cacher cette catastrophe capillaire et je ne te parle pas de l’image que je renvoie je suis quand meme une femme et voir que je perdais cet atout féminin était pour moi vraiment très traumatisant) et en plus je commençais à ne plus tolérer l’anti TNF car le produit me brulait et me laissait des hématomes.
J’en parle alors à mon gastro qui décide de passer à un autre protocole. On injecte un autre produit en hôpital de jour (je rentre le matin, j’ai une consultation avec un medecin puis on m’administre ce produit par voie centrale). Normalement au début du protocole j’ai une séance toutes les semaines pendant un mois puis toutes les 2 semaines pendant un mois, puis on passe à une fois par mois, puis tous les 2 mois. Sauf que mes analyses sanguines montrent que le traitement fonctionne « mal ». On réduit alors le temps entre les 2 injections. On passe à 7 semaines puis 6 et là j’en suis à toutes les 5 semaines. ça a l’air de se stabiliser et j’ai en plus un traitement de fond, toujours sous i******, acide folique et vitamine B car j’ai pas mal de carences.On discute avec mon gastro d’autres protocoles, une autre molécule ou réopérer encore une fois. Cette fois-ci, la maladie est sur 2 tronc eaux d’intestin qui font un peu plus de 40 cm au total ms avant, il faut contrôler la maladie et que l’intestin de soit plus inflammé.

> Ta vie a-t-elle changé ?
> J’essaie de faire en sorte que la maladie ne dicte pas ma vie ms c’est assez compliqué surtout en période de crise. Je m’isole beaucoup, on peut penser que je suis asociale mais je fais face à deux types de personnes que je ne supporte pas trop ; l’un ne comprend pas et l’autre s’apitoie sur mon sort et cela devient insupportable.
Et puis j’ai une cicatrice de 20 cm sur le ventre ça change la perception que tu as de toi (physiquement j’entends).
Et puis maintenant j’ai un nouveau rythme de vie, toutes les 5 semaines je dois aller à l’hôpital pour recevoir mon traitement donc beaucoup d’organisation avec le boulot et la vie privée aussi parce qu’il faut prévoir week-end, vacances, etc en incluant mes séances aux programmes.
> Es-tu « sortie » d’affaire pour l’avenir ou est-ce une maladie que l’on garde toujours ?
> Malheureusement, c’est une maladie dont on ne guérit pas (encore). Beaucoup d’études sont faites, je fais partie d’un programme d’étude, de suivi.
Et puis à cause de cette maladie j’ai plus de « chance » (1/3 de plus) de développer un cancer qu’une autre personne.
Mais bon je ne m’apitoie pas sur mon sort je fais avec.
> Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à quelqu’un qui vient d’apprendre qu’il a la maladie de Chron ?
> Je n’ai pas de conseil à donner, chacun est libre de faire ce dont il a envie. Certains sortent du protocole de soin et arrivent à gérer la maladie, d’autres n’y arrivent pas. Mais il faut en parler. Moi, j’ai décidé d’en parler pour mettre des mots sur mes maux et il y en encore que je n’ai pas racontés.
> Comment envisages-tu l’avenir de manière générale ?
> Alors là aucune idée… Je subis la maladie, elle dicte ma vie en quelques sortes. Si elle décide de m’embêter, je l’écoute fais ce qu’elle me dit, mets en pause tous mes plans etc. Par exemple, on me dit souvent « t’as pas d’enfant?!? ». Bon déjà il faut le géniteur mais au delà de ça il faut aussi que la maladie soit contrôlée et en plus, les produits que l’on m’injecte dont le métho******* sont contre indiqués pour la grossesse (risque très très élevé de malformation de l’enfant et risque pour moi également), donc je prend mon mal en patience, je me fais une raison et j’utilise beaucoup l’humour.
En tout cas, la maladie est là, elle fait partie intégrante de ma vie et je compose avec elle au jour le jour.
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